Quand on m’a demandé d’écrire un article à propos du nouvel album d’Iron Maiden, j’ai un peu hésité. Ce groupe est un monstre sacré et toute critique qui ne va pas dans la direction espérée par le lecteur risque de créer des flammèches. Pour certains il s’agit d’un pur chef-d’oeuvre, pour d’autres c’est rien de moins qu’un pétard mouillé. Je ne suis pas un trouillard, j’accepte le défi et je sais que MA Rush arrivera avec son propre verdict la semaine prochaine; alors attendez un peu avant de me lancer des roches!
D’entrée de jeu, je dois vous avouer ne pas avoir été du tout impressionné par la première pièce de l’album, la chanson éponyme de surcroît. Même après plusieurs écoutes, j’ai du mal à comprendre le choix de la formation pour ouvrir les hostilités avec ce titre plutôt mou. De plus, la production est un brin inégale, peut-être pour camoufler certaines limites de Bruce Dickinson, qui sait? Cela dit, ce morceau n’est pas une nullité, loin de là, et sa dernière partie est fort intéressante. Il s’écoute très bien et se fondrait aisément dans le reste de l’oeuvre s’il se situait un peu plus loin.
Tant qu’à nommer un peu de négatif, aussi bien vous dire que l’intro de Lost in a Lost World ne me plaît pas, mais vraiment pas. Ça frôle même l’insignifiance à mes oreilles. Dommage car cette chanson écrite par Harris est vraiment solide. À part cela, je pourrais nommer un certain manque de « créativité et de surprise », mais peut-on vraiment reprocher cela à un groupe qui existe depuis plus de 40 ans? Finalement, il y a aussi Caveman Shirley qui ne m’a jamais convaincu aux manettes avec Maiden, mais je pense que c’est surtout Harris qui le guide un peu trop…
En fait, comment décrire ce dix-septième album studio de la formation britannique? Senjutsu est en fait la sixième parution du Maiden des années 2000, cette mouture à trois guitares qui avait pris forme avec le retour en force de Bruce et d’Adrian dans le groupe. Depuis le fameux Brave New World paru en 2000, on sent une certaine formule dans le processus créatif, un style plus progressif et théâtral est mis de l’avant. Il y a encore des éléments ici et là du Maiden des années ’80, mais on est vraiment dans la signature du Maiden 2000 la plupart du temps. Donc si vous détestez le Maiden de Brave New World à The Book of Souls, je serais bien surpris que ce Senjutsu soit votre tasse de thé. Par contre, s’il y a du positif pour vous dans l’oeuvre « récente » du groupe, il se pourrait que cette nouvelle offrande se retrouve dans le haut de votre palmarès des 21 dernières années, peut-être même dans votre palmarès Maiden tout court.
Du positif, il y en a beaucoup tout au long des 82 minutes, peu importe ce que certains détracteurs affirmeront. Bruce semble en meilleur forme que sur Book of Souls, le jeu des lead guitars est pimpé à souhait, une certaine diversité est au rendez-vous et les transitions sont harmonieuses. On devine aisément que cette nouvelle collection de chansons pourrait très bien se défendre sur scène, surtout musicalement. Je sens que Bruce tricherait pas mal, mais son expérience et son talent de meneur ferait bien passer la pilule. Parmi mes coups de coeur, il y a The Writing on the Wall qui peut rappeler un peu Lynyrd Skynyrd, Days of the Future Past avec son riff cru tiré tout droit des années ’80 (clin d’oeil à Anthrax?) et Death of the Celts qui aurait très bien « fitté » sur Dance of Death.
Au final, j’ai bien apprécié ce Senjutsu, plus que le précédent et probablement autant que Brave New World. Je préfère encore le Maiden des années ’80 et cet album ne vient pas du tout changer mon classement des sept premiers, par contre le plaisir est au rendez-vous à chaque écoute. L’exploit réside là, n’est-ce pas? (Guy L.)