Une critique signée MA Rush
La formation suédoise Opeth lançait, le 30 septembre dernier, son 12e album studio intitulé Sorceress. Il faut maintenant se rendre à l’évidence que ce groupe, mené par le guitariste-chanteur et principal compositeur, Mikael Åkerfeldt, semble avoir définitivement abandonné son style Death Metal Progressif. Ce qui caractérisait si bien Opeth sur des albums comme Blackwater Park (2001) ou Deliverance (2002) est remplacé par une approche se réclamant beaucoup plus du Rock purement Progressif des années 70. On pouvait déjà noter qu’Åkerfeldt était moins intéressé à utiliser sa voix gutturale depuis l’album Watershed (2008), voix qu’il a totalement abandonnée sur l’album Heritage paru en 2011.
À l’écoute de Sorceress, un puriste du Métal lourd restera donc sur sa faim. Cependant, le mélomane ouvert d’esprit se verra servir un très grand album Rock. Sorceress regorge évidemment d’influences pigées à même le répertoire des grandes formations des années 70 comme Jethro Tull, pour la pièce Will of The Wisp, ou encore Led Zeppelin, en version marocaine, sur la pièce The Seveth Sojourn. Les guitares d’Åkerfeldt et de Fredrik Åkesson nous rappellent parfois Steve Hacket (Genesis), Ritchie Blackmore (Deep Purple, Rainbow) ou Tony Iommi (Black Sabbath) en ce qui a trait à la palette sonore utilisée. Évidemment, quand on parle de Rock Progressif, il faut accepter la présence de claviers, et Joakim Svalberg nous offre une belle variété de sonorités telles que du piano, du clavecin, du Mellotron, de l’orgue Hammond et même du synthétiseur Moog, pour un solo, sur la pièce Chrysalis. Parlant de solos, il y en a bien évidemment sur cet album mais ils servent les chansons plutôt qu’à satisfaire l’égo des guitaristes ou du claviériste et ils ne s’étirent pas inutilement. D’ailleurs, une seule pièce de l’album dépasse les 8 minutes, il s‘agit de Strange Brew.
Ceci dit, les deux principales forces de Sorceress sont la voix d’Åkerfeldt et les mélodies envoûtantes présentes tout au long de cet opus. Lors de certaines entrevues, Åkerfeldt a récemment mentionné s’être senti libéré suite à l’abandon de sa voix gutturale (Death Growl) en studio et on peut remarquer que la qualité de son chant, quoique déjà présente depuis longtemps, n’en est que meilleure. On jurerait parfois, en l’écoutant, reconnaître un Serge Fiori de l’époque de l’Heptade (Harmonium) croisé avec un Ian Anderson (Jethro Tull) de la période 1971-75. Certains morceaux comme Sorceress, The Wilde Flowers ou encore Strange Brew sont carrément sublimes et accrocheurs du point de vue de leurs mélodies et de leur orchestration majestueuse qui s’inspire parfois du Jazz fusion ou d’un groupe comme Rainbow, période Dio. D’ailleurs, peut-on vraiment ne pas aimer une chanson comme Sorceress, qui débute avec une intro très Jazz et dont les premières paroles sont « I’m a Sinner, and I Worship Evil », paroles chantées sur un riff de guitare très lourd et inquiétant ?
Opeth – Sorceress (official lyric video)
La section rythmique de Martin Axenrot (batterie) et de Martin Mendez (basse) fait un travail colossal pour tenir ensemble les nombreuses couches musicales qui tapissent l’album. Oui, il y a de la guitare acoustique sur certains morceaux de la rondelle mais aussi de la guitare très croustillante et distortionnée (sans être Death ou Thrash) et cette dernière est utilisée de manière très calculée à des moments minutieusement choisis. Cette dichotomie entre moments acoustiques et moments distortionnés a d’ailleurs toujours été présente dans le répertoire d’Opeth.
Avec Sorceress, nous sommes en présence d’une œuvre d’art qui, dans un monde idéal, devrait se retrouver dans le Top 10 de nombreux classements musicaux de fin d’année.
Opeth – Sorceress (Nuclear Blast)
La cote MA Rush : 9 sur 10.
Opeth- The Wilde Flowers (official lyric video)
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