Me revoici après quelques semaines de congé, la meilleure de toutes les thérapies. Je suis même allé visiter Toronto, question de vivre par le fait même un deuxième déconfinement et de pouvoir constater que c’est partout un peu pareil finalement. En effet, le début de l’après-Covid est enfin arrivé même si le spectre du virus maudit plane toujours. Il y a ceux qui sont clairement passés à autre chose, ceux qui pensent encore être au coeur de la pandémie, ceux qui nient ce qui s’est abattu sur nous, ceux qui pansent leurs plaies, ceux qui désirent plus que jamais rattraper le temps perdu, etc. Tout le monde a sa petite idée et sa propre réaction, c’est bien correct ainsi. Personne ne détient la vérité absolue anyway, n’est-ce pas, humble lecteur? Dis-moi que tu ne fais pas partie de ceux qui pensent SACHOIR plus que les autre, stp!
La chose qui m’a le plus frappé à Toronto, c’est le calme des gens croisés un peu partout dans la ville. J’aurais pu te nommer aussi la rareté des cônes orange en comparaison avec Montréal, mais ce point est inutile. Par contre, ces quelques journées passées dans la plus importante métropole canadienne m’a fait réaliser des trucs que je ne réalise plus chez moi. J’ouvre davantage les yeux et les oreilles quand je vais ailleurs. Pourtant, à bien y repenser, les mêmes phénomènes se reproduisent ici même autour de moi, à tous les jours. Est-ce que les Torontois étaient tellement plus calmes que les Montréalais? Assurément pas. Comme mon attention était dirigée un peu partout en même temps, je remarquais peut-être moins certains détails par la force des choses, j’avoue. Cependant, c’était loin d’être ultra bruyant, désordonné, irrespectueux. Loin d’être l’image que je m’étais créée de Toronto. Loin de ce que les réseaux sociaux avaient artificiellement stéréotypé dans mon cerveau. Loin, très loin…
Le virus le plus terrible de la pandémie n’est pas la Covid-19, malgré ses morts et ses nombreux effets secondaires. Le plus terrible virus est celui qui n’a pas de nom et qui se cache au plus profond de chacun d’entre nous. Il se fabrique un univers rempli de raccourcis intellectuels, de préjugés, de vérités plus ou moins vérifiables, de jugements parfois honteusement teintés de mauvaise foi et, malheureusement, de mensonges dangereux. Tout cela alimente un feu intérieur qui brûle petit à petit nos réflexions et nos conclusions. Ce feu se contrôle en partie grâce aux contacts humains, ces moments de réalité non virtuelle qui permettent de rétablir certains faits, de détruire quelques idées préconçues. Vivre trop longtemps sur la planète Internet, isolé du vrai monde terrestre, bousille certaines données dans les boîtes crâniennes et l’absence des mécanismes de retenue derrière un clavier favorise la pullulation de comportements exécrables chez l’humain.
J’en reviens à Toronto, qui me ramène à Montréal (et tu peux changer le nom de la ville si tu le désires, lecteur mondial), qui me recentre sur ma perception des gens calmes. En général, dans un contexte normal, les gens sont effectivement calmes, voire posés. Pendant un concert, un événement sportif ou un rassemblement quelconque, la donne change. Les référents et les cadres ne sont plus les mêmes. Les comportements peuvent alors surprendre. La réalité cybernétique n’est déjà pas un environnement si normal que cela pour un humain, on ajoute à cela depuis trop longtemps un stress pandémique, des mesures sanitaires et une surexposition virtuelle à un grand groupe d’êtres fragilisés à différents degrés. La donne est complètement changée: allô le chaos interne, la détresse mal gérée, le besoin d’extérioriser, la dérape et tout le reste. Trop de gens ne sont plus eux-mêmes ou deviennent incapables de contenir le moins beau de ce qu’ils sont. Cela crée un immense fracas et c’est ce vacarme que je perçois, que j’entends résonner, qui me donne mal à la tête, qui teinte mes perceptions, qui me tire vers l’abîme.
Je me promets une chose, lecteur compréhensif, c’est de sortir davantage de cet univers virtuel pour replonger dans le vrai monde, au propre et au figuré. La réalité sera certes encore une fois une question de perceptions, mais ces gens en chair et en os me rapprocheront davantage de la vérité, celle qui m’apaise et m’encourage à avancer.