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Tragiquement beau

Une réflexion de Roos Spekto

Thank You for that!

T’as vu ce dernier show des Tragically Hip à Kingston? Télévisé coast to coast par la CBC qui a mis de côté sa retransmission des jeux olympiques en ce samedi soir prime time, ce spectacle était en fait un énorme cadeau. Un cadeau à Gordon Downie, aux gars de Tragically Hip et aux fans de la formation. Un cadeau de Gordon Downie, des gars de Tragically Hip et des fans de la formation. Tous cherchaient à célébrer la vie et la carrière du chanteur des Hip une dernière fois. Un gros merci réciproque rempli d’émotions partagées, partagées dans tous les sens du mot…

Je ne suis pas un vrai fan de Tragically Hip. Je ne possède qu’une demi-douzaine de leurs albums et aucun de ceux-ci ne m’a fait tripper de la première note à la dernière. Bien que Day for Night se soit régulièrement trouver une place dans mes écoutes au milieu des années ’90, particulièrement grâce à Grace, Too et à ma pièce préférée, Nautical Disaster, ce band a toujours été trop rock-canadien-carré-moody-fm-friendly pour mes oreilles davantage portées vers le heavy metal, le grunge ou le punk. Pourtant, ouais, pourtant…

Je savais que je me ramasserais devant ma télé, loin des amis, loin de la civilisation, autour de 20:30 ce fameux samedi-là. Une force intérieure m’obligeait à être témoin de cette dernière prestation de Gord et sa bande. Oui, je voulais entendre quelques chansons que j’aime bien, mais, surtout, je voulais vivre seul ce moment spécial qui s’offrait à moi. Remarquez l’emploi abusif de la première personne dans ce paragraphe (et dans le texte au complet finalement), il est très important. Et tant mieux si ce je se calque en vous après la lecture de ma réflexion. Alors oui, je tenais à être présent dans mon salon avec ces gars qui ont accepté de s’y présenter par le biais de la magie télévisuelle. Je les avais déjà vus en personne, puis en DVD, mais jamais avec ce sentiment d’urgence. Je pouvais les revoir un autre jour, lors d’une future tournée. Pas cette fois. Des adieux. Tu sais ce que ça veut dire, des adieux? Ouais, des actions et des paroles qui annoncent une séparation définitives, ou à tout le moins pour une période très longue, très très longue. Et quand on sait que Gord nous quittera dans un futur relativement proche, gracieuseté du glioblastome multiforme, on comprend que les adieux ne sont pas de la frime, comme c’est souvent le cas dans ce monde actuel. La fin est la fin. Pas une pause en attendant…

La première partie était un long hors-d’oeuvre (ou un doux apéro selon vos goûts). Une mise en place de l’essentiel. Une façon habile de permettre aux acteurs et aux spectateurs d’apprivoiser l’instant. Peut-on se mettre dans la peau de Gordon quelques secondes? Pas évident. Et dans celle de ses compagnons? Pas mieux. Pendant une heure et des poussières, la trame musicale était bien celle des Hip. Peut-être que les vrais fans pouvaient l’apprécier pour ce qu’elle était artistiquement parlant. Pour les autres, m’incluant, c’était autre chose. Pour moi, une belle occasion pour réfléchir. Me questionner sur le sens de la vie, bien sûr, mais surtout penser à ceux que j’aime. Il y a mes frères qui se contrecrissent éperdument des Hip, mes parents qui ont fait leur possible pour ne pas faire de moi un fou furieux, mes amis qui m’endurent, mes collègues qui me subissent, etc. Gordon est eux; ils sont Gordon. Derrière le chanteur se cache un homme, un conjoint, un père, un ami. Son dernier compte à rebours est amorcé. Et si c’était Phil? Rio? Linda? Moi?

La suite du spectacle est un véritable party. La bête est domptée; le band se déchaîne et la foule se laisse aller. Tube après tube, le bonheur monte d’un cran. L’appréhension de la finale ne se pointe désormais qu’aux silences. Les discours du leader sont écoutés religieusement; les paroles des chansons prennent un tout autre sens. Le temps est figé. Le futur ne compte plus. Le plus beau cadeau de la soirée n’est pas la setlist, le plus beau cadeau est cet abandon forcé de tout afin de profiter du moment présent. Que la vie soit un privilège ou une salope selon le point de vue, on sait qu’elle n’est pas éternelle. Elle peut être courte ou longue, mais elle vient avec une date d’expiration dès la naissance. Gordon a une bonne idée de la sienne. Au lieu de l’attendre seul en ruminant, il a choisi de profiter à fond du temps qu’il lui reste. C’est le message qu’il faut retenir. Dès maintenant. Pas demain, pas dans cinq ans, pas à la retraite, pas à quelques mois de la mort. Profitons de cette vie right fucking now!

Cher Gordon, j’emprunte donc tes sages et simples mots pour te dire à mon tour:  Thank You for that! 

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Tragically Hip fans watch the final concert in downtown Kingston. (Photograph by Nick Iwanyshyn)

Photo en une: huffingtonpost.ca

Setlist du spectacle:

http://www.cbc.ca/news/arts/hip-man-machine-poem-setlists-1.3717139

Suivre Roos Spekto:

https://spektophiles.com/

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